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 « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose

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Raphaël Grimes
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Raphaël Grimes
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MessageSujet: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptyDim 21 Juil 2019, 18:01

« Bon sang, bouge-toi ! On n’a pas toute la journée ! » râla Raphaël au travers de la fine porte de la salle de bain. Bougon comme un ours, il n’arrivait pas à comprendre comment une personne pouvait mettre autant de temps à se préparer. Prendre une douche, se sécher, enfiler des vêtements propres et se brosser les dents n’étaient pourtant pas des taches insurmontables. Dans un état de constant énervement dès le matin, le motard devait reconnaître qu’il l’était bien plus ce matin précis. Si cela continuait ainsi, il allait être en retard à son travail.
Raphaël n’avait jamais été quelqu’un de scrupuleusement ponctuel. Bien au contraire, il semblait qu’il possédait une capacité spéciale qui l’empêchait d’arriver à l’heure précise où il aurait dû venir. Pire encore quand il gérait son garage et était son propre patron. Il n’ouvrait jamais aux horaires qui étaient inscrits sur la devanture, ne démarrait parfois jamais de la journée, trop gonflé d’alcool et de fatigue qu’il était de la vieille. L’armée lui avait enseigné une rigueur qu’il avait quittée sitôt dépouillé de son uniforme, comme on oublie les vieilles formules de mathématiques qui ne nous servent plus. Respecter une heure, c’était se plier à des règles mais Raphaël n’aimait pas se plier au système. Il n’aimait pas que quiconque puisse lui dicter sa loi. Mais à présent que sa vie avait pris un tout autre tournant et qu’Alaric l’avait accueilli sous son aile, qu’il avait appris que l’on pouvait respecter des règles pour gagner de l’autonomie et sa liberté, et qu’ils baignaient l’un et l’autre dans les mêmes magouilles, il se montrait plus prompt à observer quelques contraintes. Plus encore car il ne lui était plus permis de perdre un nouvel emploi. Pour lui-même il se racontait que des raisons pratiques l’enchaînaient à une revenue d’argents régulière en faisant un métier aux conditions agréables. La réalité était toute autre. A présent, il savait qu’il ne devait plus commettre la moindre erreur. Pour sa sœur, pour Lyra, pour sa véritable fille, pour se prouver qu’il n’était pas ce monstre abominable que Judith avait fui.
De nouveau, il tambourina furieusement à la porte, beuglant plus fort encore. « Pour la dernière fois, sors d’ici ! » Quelques secondes suffirent pour que sa menace fasse effet. Le loquet jouet dans la serrure, la porte s’ouvrit et découvrit la frêle silhouette de Lyra. La petite releva un regard ennuyé vers le motard de sa frimousse effrontée. « Franchement, tu râles pour un rien. Moi je comprends pourquoi ta femme elle t’a quitté. » Raphaël se sentit immédiatement bouillir de l’intérieur. Il aurait bien voulu lui crier qu’il ne lui avait rien demandé, que c’était elle qui ne cessait de lui courir après, qu’elle était cette créature infernale qui s’accrochait à lui en l’appelant « papa » alors qu’ils ne se connaissaient ni d’Eve, ni d’Adam. Ils s’étaient rencontrés un jour de fugue dans le plus grand hasard qui le monde ait pu créer, et elle avait décidé de lui pourrir l’existence.
Hier soir, Lou avait frappé à sa porte, Lyra à ses côtés. Elle lui avait fourré un sac dans les bras, l’avait informé du fait que la petite voulait passer la nuit chez lui ou sinon, elle brûlerait l’orphelinat, et elle s’était barrée en les laissant tous les deux. Ainsi, il s’était retrouvé comme un gland à gérer une gamine de même pas dix ans qui était une sale gosse effrontée. Il s’était tapé du Disney toute la soirée en l’entendant chanter à tue-tête. Pourtant, il réprima toutes ses paroles empoisonnées et grogna dans sa barbe. Il attrapa sa veste qu’il enfila, puis jeta la sienne à Lyra. « Allez, on se tire. Il faut encore que je t’emmène à l’école en plus. » Cette fois, elle ne fit pas d’histoires, trottinant derrière lui avec légèreté comme si elle n’était pas la source du noir nuage qui survolait la tête du mécanicien. Il l’embarqua sur sa moto et ne prit guère de précautions durant le trajet. Il voulait arriver vite. Quand il déposa à l’école, il se sentit obligé de lui faire des recommandations. « Bon, je te préviens, cette fois, tu n’as pas intérêt à fuguer de l’école sinon je t’arrache la tête de ton corps. Tu y vas et tu suis tous tes cours ! » Lyra afficha un sourire charmant comme si elle n’en avait rien à faire de ce qu’il disait. Elle lui fit de grands signes de mains tandis qu’elle s’éloignait. « Promis papa ! Passe une bonne journée ! » - « Je ne suis pas ton père ! » hurla-t-il à plein poumons sous le regard de parents offusqués. « Qu’est-ce que vous voulez ? Vous voulez ma photo ?! »

Il reprit son chemin jusqu’à enfin arriver au garage. Pile à l’heure. Il n’aurait pas fallu une minute de plus. Raphaël se hâta d’enfiler son uniforme puis de se rendre à l’atelier pour poursuivre son ouvrage. Il salua ses collègues déjà présents et releva également la mine morose de Milie-Rose, la seule femme de ce garage. Autant dire que ce n’était pas véritablement ce qui enchantait Raphaël, fervent défenseur des vieilles traditions désuètes de l’Amérique profonde qu’il était. C’était la première fois que Raphaël pensait qu’Alaric avait fait une erreur. Embaucher une femme, quelle idée ! Autant demander à un enfant de porter deux cent kilos sur ses épaules. « Bah alors, on fait la gueule Rosie ? On s’est cassé un ongle ? » Seulement, elle ne sembla pas répliquer à sa pique misogyne, fait très étonnant. Il ne chercha pas plus loin et se remit à l’ouvrage. Cet incident ne revint pas le hanter avant qu’une pause aux toilettes ne se fasse urgente. Evidemment, les toilettes étaient mixtes. Et tandis qu’il se délestait au pissoir, il crut entendre des reniflements caractéristiques d’un flot de larmes. Peu bercé dans les préoccupations du genre humain, il s’étonna néanmoins à demander : « Eh, ça va là-dedans ? » Pas vraiment de réponse. Il haussa les épaules, tira la chasse et partit se laver les mains. Puis quelques secondes après, il vit Rose sortir des chiottes avec une profonde tête d’enterrement. Cela l’énerva profondément sans qu’il ne sache pourquoi. « On peut savoir c’qu’il t’arrive à toi ? » demanda-t-il, agressif. En vérité, il n’en avait rien à foutre. Ce qui le dérangeait le plus, c’était qu’elle ne lui réponde plus. Cela l’avait vexé en parti. Ça, c’était chiant. Parce qu’une femme qui ne parle plus, c’est toujours le signe des embrouilles.
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Millie-Rose Perkins
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Millie-Rose Perkins
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MessageSujet: Re: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptyDim 21 Juil 2019, 20:45

Blottie dans les bras réconfortants d’Ethan, je n’étais pas parvenu à trouver le sommeil cette nuit-là. Je n’avais pas arrêté de penser aux paroles de Dante, aux paroles d’Ethan. Elles étaient si diamétralement opposées, que je ne savais plus lesquelles étaient les plus justes pour me définir. Méritais-je vraiment de mourir pour avoir disparue, vingt années plus tôt ? Méritais-je vraiment de survivre pour avoir voulu être heureuse, vingt années plus tôt ? Je l’ignorais. Je supposais que la question la plus juste deviendrait une évidence au fil des jours, au fil du temps ? Je l’espérais, du moins, tandis que le réveil se mit à sonner sur la table de chevet d’Ethan. Il était six heures. Dans deux heures, nous serions tout deux au garage.

« _ Tu as pu dormir ? M’interrogea-t-il, me caressant tendrement le bas du dos.
_ Pas vraiment. Je lui répondis aussitôt d’une petite voix, préférant jouer la carte de la vérité. _ Ma tête n’a pas arrêté de bosser de la nuit.
_ Nous devrions peut-être nous faire porter pâle, aujourd’hui. Je ne pense pas qu’il soit judicieux que tu travailles dans ces conditions, et je refuse de te laisser seule livrée à toi-même.
_ Non. Je protestais, sans aucune vigueur. _ J’ai besoin de travailler. Je suis certaine que cela me changera les idées. »

Cela avait toujours fonctionné ainsi, depuis que j’avais quittée mon Italie natale. Il me suffisait de mettre les mains dans le cambouis pour oublier, le temps de quelques heures, tout mes soucies ; cela devait encore être efficace ce jour-là.

« _ Très bien. C’est comme tu veux. Je vais nous préparer un succulent petit-déjeuner, dans ce cas. Salé, comme toujours ?
_ Oui. »

Je confirmais, un léger sourire aux lèvres. C’était impressionnant de redécouvrir qu’il mettait de l’importance à chaque petit détail me concernant. Il savait autant ce que j’affectionnais de ce que je détestais. Ce qui faisait qu’il avait toujours dans ces placards des petites choses à mon attention, tel que du bacon, que je raffolais dans des œufs brouillés. Satisfait d’avoir encore raison, il embrassait mon bout de nez, avant de quitter le lit. J’admirais ces courbes masculines, les comparant naturellement avec celles de Dante. Elles n’avaient certainement rien de similaires, mais il me plaisait de croire encore qu’ils se ressemblaient physiquement jusqu’au plus petit grain de peau. Et c’était triste de constater que je devais – sans vouloir lui être désagréable – me contenter d’un substitut à la réalité. Bianca se réveillait-elle également dans ses bras, bercée par la douceur avec laquelle il savait tant m’aimer ? Je l’imaginais, et cette idée suffit à me faire pleurer silencieusement, la tête enfouie dans la couette.

« _ Viens, ne reste pas seule. M’intima doucement Ethan, dévoilant mon chagrin à la lumière naissante du soleil par la fenêtre. _ Viens avec moi en cuisine. »

J’obtempérais mollement, sans réelle volonté. Je me conformais à ces attentes, dans l’espoir que sa bienveillance puisse raviver ma joie de vivre d’antan. Je lui portais trop d’espoir, sans doute ; mais c’était « ça », ou me jeter par la fenêtre dès qu’il aurait été affairer à cuisiner. Le déjeuner fut succulent, d’ailleurs. Il ne me procura simplement pas le bonheur dont j’étais pourtant coutumière jusqu’ici, tel que je l’attendais. Quand nous eûmes finit, nous allèrent nous doucher, chacun notre tour, sous l’insécurité d’Ethan craignant mes moments solitaires, avant de rejoindre mon studio pour que je puisse me changer. Je jetais ma robe sur une pile de linges sales, sans aucun intérêt pour elle, avant de trouver une tenue plus quotidienne. Ensuite, j’attachais mes cheveux rapidement, sans grand-intérêt là non plus, de sorte qu’il ne me gêne pas au travail. Une fois prête, nous quittâmes mon logement, où il fut décidé en chemin que je n’y vivrai pas le temps que j’aille mieux, afin de rejoindre le garage, pile à l’heure. Entourées de tous mes collègues masculins, même le plus chiant de tous, Ethan pouvait travailler sans me coller en permanence. Moi, désormais vêtue de ma blouse, je cumulais les erreurs les unes après les autres, les traits fermés. Même en faisant de la mécanique, je n’arrivais pas à occulter la nuit passée, les paroles prononcées. Sans cesse, l’envie de pleurer me tenaillait la gorge. Mais je tenais bon. Je refusais d’offrir à mes collègues masculins ma faiblesse, et particulièrement à lui : Raphaël. Un macho comme on en faisait plus, de l’ancienne génération. Il considérait que la place d’une femme n’était pas dans un garage, et à plusieurs reprises, j’avais eu plaisir à lui clouer le clapet en lui prouvant le contraire. Or, ce jour-là, je n’étais pas d’humeur. Je ne relevais donc pas sa remarque sexiste, pour laquelle j’aurais normalement eu la répartie adéquate, et je continuais ma tâche sans lui accorder l’attention qu’il était en droit d’obtenir d’ordinaire.

Après quelques heures à cumuler les maladresses, les pensées moroses, je me réfugiais dans les toilettes pour pleurer. Il n’y avait personne, je m’en étais assurée. Seulement, je n’avais pas envisagé qu’un autre mécanicien pourrait y venir également lorsque j’y serais. Je contenais de ce fait, tant bien que mal, mes reniflements significatifs, dans l’espoir de passer inaperçu. *Fail* Raphaël m’avait grillée, même s’il ignorait que c’était moi. Il s’assura que tout allait bien. Je préférais me taire. S’il savait que l’unique femme du garage vient pleurer dans les toilettes, il ne manquerait pas de s’en servir contre moi dans ses remarques misogynes à venir. Ce que je voulais éviter. Ce n’était pas foncièrement un mauvais bougre, au delà des apparences. J’appréciais bien ces petites taquineries, d’ailleurs. Je ne voulais juste pas que mes faiblesses soient exposées, surtout dans un univers rempli de testostérones. J’essuyais donc vigoureusement mes joues de toutes larmes, avant de sortir des toilettes sans un regard à son attention. Honnêtement, j’espérais pouvoir me laver les mains, et lui laisser entendre que je faisais uniquement ma petite commission. Or, sachant que je n’avais pas réagi à sa remarque auparavant, que je n’étais pas « pouponnée » comme je l’aimais, et que je tirais une tête à faire peur, il était impossible qu’il ne tente pas à nouveau de me sortir de mon mutisme.

« _ Des trucs de gonzesse. Je lui répondais, sans aucune émotion précise. _ Rien qui t’intéresse vraiment. »

Raphaël était loin d’être Ethan. Il n’allait pas me prendre dans ses bras parce que – soudainement – j’exprimais mon envie de me flinguer. Elle n’était pas d’hier, d’ailleurs, du reste : elle était cultivée en arrière plan depuis une bonne dizaine d’années ou plus, désormais. Mais cela ne changeait rien aux faits : Raphaël ne considérait pas suffisamment les femmes, et encore moins la collègue que j’étais, pour vouloir m’aider. Je me lavais donc les mains, m’attendant à ce qu’il parte après m’avoir envoyer promener avec sa délicatesse légendaire.

@Raphaël Grimes
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Raphaël Grimes
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MessageSujet: Re: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptyLun 22 Juil 2019, 23:16

Raphaël n’était guère bercé dans l’art subtil de comprendre les considérations féminines. A vrai dire, il songeait que tout ce qui passait par l’esprit tortueux d’une femme et sortait par sa bouche délicate était sujet à problème et à incompréhension. Le motard se contentait de principes simples. Il jouissait d’une palette de sentiments et de raisonnements suffisamment restreintes pour ne pas s’empoisonner constamment l’existence avec des réflexions hasardeuses et souvent déprimantes. Plusieurs fois, le mécanicien avait tenté de se pencher sur les mécanismes féminins, comme il étudierait le capot d’une voiture. En premier avec ses sœurs, puis avec les femmes qui avaient peuplé son existence, aujourd’hui avec ses filles… Toutes ces expériences l’avaient mené à la conclusion limpide qu’il n’y comprenait rien, mais surtout, qu’il n’en avait rien à faire. Car tout ce que Raphaël ne comprenait pas, cela ne l’intéressait pas. Il ne détenait ni la patience, ni la rondeur suffisante, encore moins la finesse d’esprit nécessaire pour s’attarder sur les méandres des états-d’âme féminins. Après tout, lui-même avait suffisamment de problèmes de son propre côté pour ne pas s’encombrer avec les problèmes d’autrui ; d’autant plus que le motard avait généralement tendance à considérer que les siens revêtaient une importance bien plus capitale.
Ainsi, il ne s’était pas attardé plus d’une microseconde sur la tête d’enterrement que tirait Rose. Il ne vit ni ses cernes marqués, ni son teint crayeux, encore moins les gestes moins assurés de ses mains expertes. A vrai dire, ce qui le frappa bien plus que sa mine inhabituelle, ce fut son absence de réponse.

Depuis que Raphaël et Milie-Rose étaient devenus des collègues, un jeu bien particulier s’était instauré entre eux. Une rivalité qui avait premièrement trouvé sa source dans tous les préjugés du mécanicien, celui-ci affichant sans honte ni pudeur qu’il n’appréciait pas qu’une femme vienne mettre son nez sous un capot de voiture. Il considérait que certains travaux étaient réservés aux hommes, et d’autres aux femmes. Cela était l’état naturel des choses, et que cette petite brune ne le comprenne pas relevait de l’insolence pure, d’une rébellion digne d’une gamine de seize ans. Néanmoins, il devait reconnaître à la jeune femme qu’elle avait du répondant. Et s’il la lacérait de ses répliques mordantes, elle n’exécutait pas plus de ronds de jambes pour lui afficher clairement le fond de sa pensée. Elle le jugeait vieux, abruti, misogyne et macho. Raphaël se gardait bien d’approuver ses propos et aimait à lui rappeler que la force d’une femme ne pourrait jamais se mesurer à celle d’un homme. Leurs prises de bec avaient duré pendant des mois, toujours avec le soin de ne pas créer d’esclandre devant un client, ou sous les yeux d’Alaric qui n’aurait pas apprécié un tel spectacle. Et puis, finalement, ces joutes s’étaient transformées en exercices amusants, en taquineries cinglantes qui plaisaient autant à l’un qu’à l’autre, sans véritablement se l’avouer. De la même manière que Raphaël admettrait très difficilement que Milie-Rose accomplissait très bien son métier. Alors c’était presque devenu une habitude, un leit motiv quotidien qui les maintenait éveillés.
Sauf que là, elle n’avait pas répondu. Et Rose avait bien porté une salopette, rire aux mêmes blagues que les mecs, s’attacher les cheveux, avoir les mains couvertes de cambouis et la tronche plongée dans des moteurs toute la journée, elle n’en restait pas moins femme. Et une femme qui ne parle pas : ce sont des problèmes. Les problèmes, Raphaël s’en tenait éloigné. Par principe.

Sauf qu’il ne savait pas vraiment ce qui lui avait pris dans les toilettes de s’inquiéter de l’état d’une personne. Bien qu’il ne voie pas la personne, le reniflement qui avait entendu était bien trop caractéristique d’une femme pour qu’il ne se doute pas que ce soit Rose. Néanmoins, il ne put empêcher ce réflexe débile de s’enquérir. D’une certaine façon, cela l’aurait rassuré qu’elle en profite pour l’envoyer chier. Elle aurait pu lui asséner une parole bien tranchante pour lui faire comprendre qu’elle n’avait pas besoin de lui, qu’il ferait mieux de se mêler de son cul et qu’il était sûrement plus dégourdi avec des moteurs qu’avec les sentiments d’une femme (ce qui était prodigieusement vrai). Hélas, rien ne lui répondit, accentuant une inquiétude qui se transforma en colère et en vexation. Qu’elle aille au diable… pensa-t-il pour lui-même. Il s’apprêtait à quitter les toilettes quand cette dernière finit par faire son apparition. Son sang bouillait dans ses veines sans qu’il ne puisse se l’expliquer correctement. Il se contenta d’esquiver son regard avant de la jauger carrément dans la glace qui les reflétait tous les deux. Ce fut là qu’il remarqua sa mine affreuse, sa fatigue manifeste et les rougeurs qui bordaient ses yeux. Il ne fallait pas être trop con pour comprendre qu’elle avait pleuré et que ça allait au-delà d’un problème de cuticule. Il s’entendit lui demander ce qu’elle pouvait bien avoir à tirer une telle tronche.
Bon sang, qu’elle réponde merde !
Et cette fois, il put entendre le son de sa voix. Pas qu’il en fut particulièrement réjoui, mais un brin soulagé. Avant d’être parfaitement catastrophé. « Des trucs de gonzesse ? » répéta-t-il comme si cela l’aidait à mieux comprendre. Alors là, son expression se changea en dégoût et suffisance. « Vous, les gonzesses, il va peut-être falloir commencer à arrêter de vous plaindre dès qu’il vous vient vos ragnagnas. A force, on va finir par se douter de quelque chose. » Il se montrait en grand donneur de leçon. Une aberration dans la bouche de Raphaël, mais ce dernier n’était plus à une énormité près. « Ça fait quand même des milliers d’années que vous avez du sang qui vous pisse d’entre les cuisses, il serait un peu temps de prendre sur vous. » Après tout, est-ce que les hommes se plaignaient, eux ? Comme il ne comprenait toujours pas à déchiffrer l’attitude de sa collègue, il explosa. « Qu’est-ce que t’as à la fin ? On t’a volé ton tournevis ? T’as loupé la dernière émission des Reines du Shopping ?! »
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Millie-Rose Perkins
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MessageSujet: Re: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptyMar 23 Juil 2019, 16:22

Je n’attendais rien de Raphaël. Je voulais simplement qu’il quitte les toilettes et qu’il agisse comme si rien d’anormal ne s’était produit. Car rien d’anormal ne s’était produit, n’est-ce pas ? Il avait cru m’entendre pleurer de l’un des cabinets, avant de m’en voir sortir sans une trace de larmes sur les joues ? Rien ne justifiait donc qu’il bouscule nos petites habitudes, si ce n’était le seul fait que je les avais moi-même bousculée un peu plus tôt en ne lui répondant pas. Ce qui avait été idiot de ma part, j’en conviens ; mais j’étais loin d’imaginer que cela lui poserait un problème. Pourquoi me pétait-il une durite face à mon mutisme, tout d’un coup ? Il était où son problème avec le fait que je ne lui parle pas ? Cela lui manquait que je ne le traite pas de con ?! S’il ne s’agissait que de cela, je pouvais parfaitement consentir à le faire. Il ne me suffisait que d’écouter son flot d’inepties sur les femmes et leurs menstruations pour en obtenir la seule volonté. Seulement voilà : la volonté seule ne faisait pas tout, malheureusement. Je n’avais toujours pas le cœur à me prendre la tête avec un autre homme, surtout en aussi peu de temps. Je préférais donc me murer à nouveau dans le silence, tandis qu’il renouvelait sa question avec plus de virulence.

« _ Putain mais c’est quoi ton problème ?! Je l’interrogeais à mon tour, passablement agacée, le fusillant du regard dans le reflet du miroir. _ Pourquoi est-ce que tu tiens tant à me faire chier si justement, à tes yeux, je ne suis qu’une pisseuse qui pleure tout les vingt-huitième jour du mois ? »

Il venait de le hurler haut et fort de lui-même : les femmes n’étaient bonnes qu’à geindre, uniquement parce que du sang leur coulait entre les cuisses une fois par mois. Pourquoi s’obstinait-il à vouloir me parler, si selon-lui, il avait déjà la réponse à sa propre question ? Par plaisir de me faire hurler ? Par plaisir de me détruire ? Je refusais. J’étais suffisamment broyée dans l’intimité pour que ma vie au garage soit entachée par un nouveau conflit. D’autant plus que le sujet autour duquel il gravitait n’était pas anodin. Ce n’était pas rien d’entendre sa collègue vous avouer qu’elle voulait s’ouvrir les veines, et ce uniquement parce que son ex avait voulu l’étrangler dans l’intimité d’une zone industrielle. Ce n’était pas rien de découvrir de sa collègue, que l’image qu’elle vous donnait d’elle depuis tant d’années était complètement fausse.

« _ Tu vois, c’est avec des conneries comme ça que tu fais fuir toutes les femmes qui t’apprécient ne serait-ce qu’un peu. Je repris, toujours sur le même ton, la gorge nouée de subir une nouvelle altercation avec quelqu’un que j’appréciais. _ C’est à cause de connerie de ce genre que je préfère te dire de dégager et de te mêler de tes fesses, plutôt que de chercher un soupçon de soutien auprès de toi. Je ricanais brièvement, avec amertume. _ De toute façon, du soutien, même si j’en attendais de toi, je sais pertinemment que tu ne m’en apporterais pas. Tu serais le premier à te foutre de ma gueule et à me rabaisser plus bas que terre uniquement parce que je suis une femme. »

C’était con, comme raisonnement. Mais c’était le sien. Parce que j’avais une paire d’ovaires en lieu et place d’une paire de couille, monsieur estimait que je ne méritais pas le plus petit respect, la plus petite considération. Dès notre rencontre j’avais été contrainte de prouver que j’avais ma place face à lui, face à eux. Dès que j’avais mis les pieds dans ce pays j’avais été contrainte de prouver que j’avais ma place dans cette vie, dans ce monde. Et tout ça pour quoi, finalement ? Pour découvrir que mes années de luttes avaient été vaines. L’homme que j’aimais ne rêvait que d’une chose : me tuer ; et le peu d’entourage que je possédais, ne connaissait pas réellement la personne que j’étais. C’était pesant, à la longue. C’était pesant de raconter des histoires qui n’étaient jamais les miennes. C’était pesant de devoir avoir honte de celle qui agonisait au fond de moi, alors qu’elle était ma plus grande fierté.

« _ Il faut être incroyablement con pour croire qu’une femme qui bosse dans la mécanique puisse pleurer pour des choses aussi futiles et superficielles qu’un tournevis disparu, ou un programme télévisé complètement débile. Je repris, plus lasse. _ Dégage. Va te marrer en disant que t’as surpris Millie dans les chiottes en train de pleurer, et fous-moi la paix. »

C’était ce qui allait arriver, inévitablement. Alors autant qu’il le fasse immédiatement, que dans plusieurs heures avec d’autres détails croustillants à balancer entre deux réparations de voitures. Je ne voulais pas lui exposer toutes mes faiblesses, tout mes malheurs. Il n’était pas suffisamment digne de confiance, digne d’amitié, pour que je m’y résolve. C’était dommage, d’ailleurs : car sous son aspect bourru de misogyne, je l’aimais bien. Je trouvais même qu’il avait une belle âme, écorchée comme la mienne. Mais nous ne pourrions jamais aller au delà du lien qui c’était naturellement établi entre nous, justement parce qu’il était mysogyne. Je m’appuyais donc fermement au lavabo, la tête baissée, attendant l’instant où la porte claquerait derrière lui pour pleurer à nouveau.

@Raphaël Grimes
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Raphaël Grimes
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MessageSujet: Re: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptySam 27 Juil 2019, 17:45

Raphaël n’était guère célèbre pour sa patience légendaire. A vrai, le concept était tout à l’inverse de la prépondérance et le motard était plutôt enclin à céder facilement à ses humeurs. Le monde entier l’énervait d’une manière assez générale. Il n’appréciait pas les bruits de la ville, l’agitation gonflée par la foule, le mouvement trop rapide d’une bouche qui ne cesse de s’exprimer en déblatérant des propos inutiles. Pourtant, cette fois-ci, sa colère naissait justement d’un flot de paroles insuffisant. Il ne croyait pas possible que cela puisse arriver, mais Milie-Rose était la preuve vivante qu’il pouvait être parfois insatisfait des silences. L’orgueil en premier le piqua dans sa chair. Pourquoi ne répliquait-elle pas ? Et comment osait-elle l’envoyer chier lors d’une rare fois où il s’intéressait un peu à elle. En général, ils ne vivaient que de leurs joutes verbales savamment orchestrées. Un jeu dont ils connaissaient parfaitement les règles et qui leur permettaient d’actionner sans aucune gêne tous les rouages de leur relation. C’était comme jouer une partition par chœur. A force, ils étaient arrivés à une harmonie parfaite dans leur inimitié respective. Sauf que là, il s’était enquis de la santé de la jeune femme, de ses humeurs et de ses problèmes. Il ne se mêlait déjà guère des problèmes des personnes qu’il appréciait, il n’allait tout de même pas s’emmerder avec les problèmes des gens qu’il pouvait à peine supporter.

De ce fait, il ne savait pas vraiment ce qui le plongeait dans un agacement aussi certain. Le fait qu’elle refuse de lui répondre ou sa tentative stupide pour établir un lien. Après tout, qu’est-ce qu’il pouvait bien en avoir à foutre de ses histoires ? Est-ce que cela l’empêcherait de dormir ? Non. Est-ce qu’il y accordait le moindre intérêt ? Non. Est-ce qu’il chercherait à l’aider ? Encore moins. Une fois de plus, face à une telle violence dans ses propos pour masquer pudiquement un orgueil bafoué, sa collègue l’envoya chier, mais de manière plus virulente. Et la question qui taraudait son esprit prit la forme de mots. En effet, pourquoi est-ce qu’il l’emmerdait alors qu’il réduisait tous ses problèmes à une histoire d’hormones qui se déréglaient tous les vingt-huit de chaque mois ? Une moue vexée se greffa sur son visage aux traits grossiers. Il était prêt à la planter là, dans ces toilettes en lui disant qu’elle pouvait bien aller se faire foutre et qu’il n’en avait justement rien à faire d’elle, mais il se contenta de marmonner. « Parce que ça me fait chier que tu fasses cette gueule au boulot. Tu pourris l’ambiance. » Objection totalement fausse, mais il ne trouva rien de plus pertinent à répliquer. Il compta uniquement sur son assurance à déployer un tel concept pour en faire une loi valable. Sauf que cet argument ne lui suffit pas. Les paroles de Milie firent étrangement écho à celles que Lyra avait prononcées plus tôt dans la matinée. Il faisait fuir les femmes… Tout ceci n’était pas si étonnant si ça lui arrivait. Après tout, il n’était qu’un vieux grincheux à l’âme sèche et usée. Alors pourquoi cette petite lui courait désespéramment après ? Pourquoi Lou insistait tant pour qu’ils créent une relation privilégiée afin qu’il l’adopte ? Pourquoi Skylar s’accrochait à lui de tout son être, elle dont le père d’autrefois était bien meilleur que lui ? Pourquoi fallait-il que toutes les chieuses de la terre gravitent autour de lui s’il était si insupportable que cela ?

Lorsqu’elle parla de soutien, Raphaël se retint d’abonder en son sens. C’était vrai. Le motard n’avait aucun don en ce qui concernait le soutien qu’il pouvait apporter à autrui. Pour dire vrai, il était particulièrement nul pour trouver les paroles qu’il fallait, pour mimer une attitude de réconfort, pour montrer une belle partie de lui-même qu’il ne soupçonnait pas. Donc elle avait raison. Même sans se moquer d’elle, il n’aurait pas su lui apporter le soutien nécessaire. « Je ne te considère pas moins parce que tu es une femme. C’est juste parce que t’es une chieuse. » crut-il bon de préciser, comme si cette obsession sémantique aurait pu lui apporter le moindre réconfort. A cette réplique, elle lui demanda finalement de s’en aller et de la laisser. Il n’était pas forcément mécontent de l’issue de cette altercation dans les toilettes. « Bah va chier alors ! » Il râla, bougonna, ronchonna et la planta finalement dans les toilettes sans demander son reste et en claquant la porte derrière lui. « Marre de ces nanas qui ne savent jamais ce qu’elles veulent. »

Le reste de la matinée s’écoula auréolée de son humeur lugubre. Il s’appliqua à son travail comme il savait si bien le faire. Ce fut Alaric qui vint l’interrompre pour lui dire qu’il avait une mission plus urgente à lui confier. Ainsi, il dut se détacher de sa réparation actuelle pour se pencher sous le capot d’une autre voiture. Manifestement, le client était un habitué qui payait suffisamment bien pour qu’il se trouve prioritaire dans l’exécution des demandes. Son patron ajouta alors que pour aller plus vite, ils allaient s’y mettre à deux et sa voix forte appela le nom de Perkins. Les yeux de Raphaël roulèrent dans leurs orbites plus loin qu’il ne l’avait encore jamais fait dans son existence. Il maudit cette journée d’être vraiment merdique, mais il ne se permit pas de protester devant Alaric. Finalement, il se retrouva avec Milie-Rose qui arriva en traînant le pas. « Voilà notre adolescente émo qui revient. » la railla-t-il une fois qu’il fut sûr qu’Alaric était suffisamment loin. Avec sa monotonie habituelle, il se mit à l’ouvrage sans prêter beaucoup d’attention à elle, juste pour lui tenir des propos purement professionnels. Puis, tandis qu’ils étaient tous les deux la tête dans le capot, Raphaël lui demanda de vérifier un câble en particulier. De mauvaise grâce, elle s’exécuta, s’étirant au maximum pour atteindre le filament. Ce fut là qu’il vit la marque que le col de sa blouse cachait précédemment. Raphaël s’y connaissait, hélas, trop bien pour ne pas savoir de quoi il s’agissait. Tout à coup, son ton se fit profondément sérieux. « Qui t’a fait ça ? »
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Millie-Rose Perkins
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MessageSujet: Re: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptyVen 23 Aoû 2019, 17:41

Foutaise. Je pensais à sa répartie, ô combien ridicule. Raphaël n’en avait strictement rien à faire que mon humeur maussade puisse lui pourrir l’ambiance au boulot. Raphaël était plutôt vexé dans son amour propre que je l’envoie balader là où il s’estimait peut-être en droit d’attendre des justifications de ma part, et c’était entièrement prévisible. Je le comprenais d’ailleurs, soit-dit-en-passant. Cependant, je confirmais que nous n’étions pas suffisamment proches pour que je m’y résolve, y compris avec insistance. Une opinion qui ne changerait certainement pas à son comportement que j’estimais puéril, d’ailleurs. Me coller l’image de la pisseuse pleurnicharde pour un outil « volé », vraiment ? Pourquoi ? Parce que d’ordinaire j’arrivais au garage les cheveux bien coiffés, le visage bien maquillé, je méritais d’être jugée comme telle ? Conneries. J’étais une femme fière de son physique, c’est un fait, mais je n’en étais pas moins uniquement superficielle pour autant. Je crachais même sur ces débilités que la grande majorité des femmes regardaient à la télévision. Personne ne pouvait dire mieux que moi ce qui me convenait ou non. Je n’avais donc pas envie d’entendre des nunuches vanter leur goût souvent douteux en matière de fringues, pour ensuite me faire reprocher de m’habiller – soi-disant – comme un sac. Je préférais plutôt regarder des reportages automobiles, pour ne pas dire carrément des grands-prix. Comment aurait-il pu le savoir, lui qui ne prenait jamais la peine de me découvrir en tant qu’être humain à part entière. C’était impossible. Et ce n’était pas dans l’état moral dans lequel je me trouvais, que j’allais essayer de lui faire entendre raison sur son comportement daté d’une autre époque. Les femmes faisaient des métiers « masculins » et les hommes des métiers « féminins ». C’était ainsi. Il fallait qu’il s’en fasse une raison, ou qu’il aille vivre en ermite dans une forêt lointaine. […] Bref. Je contenais ma révolte intérieure, sous peine de prononcer à haute voix des choses que je serais amenée à regretter, avant de prêter une oreille attentive aux mots qu’il m’adressait. Il ne me considérait pas moins parce que j’étais une femme, mais parce que j’étais une chieuse. J’étais abasourdie. Qu’avais-je pu lui faire pour qu’il me juge ainsi ? Je l’ignorais. Et j’avais le cœur qui se serrait car, même si je ne manquais pas de répartie dans nos joutes verbales, je n’avais pas le sentiment de chercher à l’emmerder plus que cela. L’étais-je naturellement, moi la femme la plus altruiste et la moins altruiste à la fois ? C’était fort probable. Et cela faisait beaucoup de révélations sur ma personnalité en moins de vingt-quatre heures. Il fallait qu’il parte, dorénavant. Je ne voulais pas pleurer devant lui comme je ne voulais pas plus me confier à sa personne. Un fait qu’il comprit immédiatement, me disant d’aller chier (très classe), avant de partir en claquant la porte des toilettes. Très sincèrement, je n’avais jamais vu un homme avoir un comportement aussi théâtral pour quelqu’un dont il se fichait éperdument.

Mais soit. Mes larmes séchées, quelques instants plus tard, je quittais les toilettes communes pour reprendre mon travail. Et là, la tête dans le moteur, je m’assurais que personne d’autres ne remarquent ma mine d’enterrement, à défaut de travailler convenablement comme j’en avais coutume. C’était risqué de me laisser une voiture entre les mains ce jour-là ; mais cela l’était surement encore plus quand il s’agissait de travailler en binôme avec Raphaël. Et merde. Pourquoi Alaric se souvient-il de mes talents de mécano précisément aujourd’hui ? C’était là une question que je ne lui ferais pas l’affront de lui demander. Je répondais plutôt silencieusement à son appel, en quittant la voiture sur laquelle j’étais affairée, pour le rejoindre, lui et Raphaël, devant celle qui m’attendait, le pas traînant. Un simple doigt d’honneur. Voilà ce que j’adressais à mon collègue, m’emmerdant plus que de raison avec ces remarques déplacées. J’avais compris que mon humeur ne lui sciait guère, il était inutile qu’il insiste. Et je le remerciais intérieurement qu’il s’y plie immédiatement. Je n’avais pas envie de me donner en spectacle devant les autres, uniquement parce que mon visage ne lui revenait pas précisément ce jour-là. Tout comme lui, je m’affairais également à la tâche sans lui accorder plus d’attention que nécessaire, quand il me demanda finalement de vérifier un câble, tandis que j’avais la tête dans le capot. Ne pouvait-il pas le faire lui-même ? Non, apparemment. Je soupirais profondément en guise de réponse, avant de m’étendre pour atteindre le câble en question. C’est à ce moment là qu’il m’interrogea très sérieusement sur les marques que j’avais à mon cou. Soudainement, dans un geste empressé, je relevais le col pour le cacher, avant de me mordre la lèvre inférieure de confusion. Qu’allais-je bien pouvoir lui dire ? Qu’allais-je bien pouvoir inventer pour l’éloigner des confidences que je lui taisais ? Je n’en avais aucune idée. Et la détresse dans mon regard, que je gardais toujours cacher à ses yeux, suffisait à faire comprendre que je n’en trouverais jamais aucune. Quelle connerie pourrait couvrir une vérité aussi visible ? Une mauvaise chute ? Un coup malencontreux ? Foutaise. Des marques de strangulations en restaient, quoiqu’on en dise. Et Raphaël l’avait déjà constaté, d’ailleurs. Il ne me restait donc plus qu’à répondre à sa question : qui en était le responsable. Un monstre ? Mon ex ? Mon Ex monstrueux ? Les trois revenaient au même quand on y pensait.

« _ Un monstre que je croyais connaître. Je lui soufflais, le ton grave. _ Mais oublie ça, d’accord ? Je lui demandais à la suite, relevant mon visage suppliant en sa direction. _ Je ne veux pas qu’il s’en prenne à d’autres personnes que moi. Alors fais comme si tu n’avais rien vu et n’en parle à personne. »

Je méritais ce qu’il m’avait fait. Je ne cessais de m’en convaincre à chaque instant. Je tenais donc à ce que Raphaël ne s’interpose pas dans une histoire qui n’était pas la sienne.

HRP:

@Raphaël Grimes
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MessageSujet: Re: « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose    « L'égalité homme/femme ? On en reparlera quand il faudra porter des choses lourdes ! » + Milie-Rose  EmptyDim 29 Sep 2019, 18:13

Raphaël cumulait suffisamment de problèmes à lui tout seul pour ne pas s’appesantir avec ceux des autres. D’ailleurs, c’était principalement pour cela qu’il préférait s’affranchir de la compagnie d’autrui, des fois qu’il lui viendrait l’idée de s’impliquer dans la vie de ses amis. Mais alors là, pourquoi venait-il à s’encombrer des ennuis d’une personne qu’il connaissait à peine ? Pire encore, qu’il n’appréciait pas nécessairement ? Milie-Rose et lui passaient leur temps à se balancer des piques à la tronche ; lui parce qu’il ne supportait pas de voir une femme prétendre s’occuper d’un moteur, elle parce qu’elle refusait de se laisser faire. En soi, c’était devenu une mécanique bien huilée où les deux employés d’Alaric s’envoyaient des atrocités à la tronche pour se motiver et s’occuper un brin l’esprit. Raphaël n’aurait jamais prétendu qu’une amitié s’était nouée entre eux au cœur de ces taquineries un peu amères, mais il devait reconnaître qu’ils avaient dépassé le stade du cordial.
Sauf que là, elle faisait la tronche, elle s’emmurait dans son silence et dès qu’il tentait de grignoter un peu son vernis –certes avec peu de délicatesse– voilà qu’elle l’envoyait chier de la porcelaine chinoise. Raphaël n’était pas un mec suffisamment altruiste pour qu’il puisse survivre à un seul coup porté à son orgueil ou souffrir une pareille ingratitude. Tant pis pour elle, qu’elle aille crever dans les flammes de l’enfer cette pauvre garce. Après tout, qu’est-ce qu’il pouvait bien en avoir à foutre ?

Ainsi, il était retourné l’esprit tranquille à son ouvrage, confiant dans l’idée qu’il avait déjà donné bien plus qu’il n’aurait dû pour une fillette si ingrate. Il pourrait poursuivre sa vie l’âme tranquille. Tout ceci aurait pu se finir de la meilleure des manières pour Raphaël si une mouche n’avait soudainement piqué Alaric et qu’il ne décide que les deux zigotos allaient œuvrer ensemble. Le mécanicien était prêt à récrier pour braver l’injustice et poursuivre une journée affranchie de la compagnie d’une femme qui subissait manifestement fortement les symptômes de ses menstruations.
Il obéit néanmoins à l’ordre qu’on lui avait dicté, non sans ruminer son mal et toutes ses peines. Dès qu’elle prit l’ouvrage à ses côtés, il se lança dans de nouvelles piques. Pas uniquement pour la stimuler, mais également par profonde amertume suite à ce qu’il venait de se passer. Ses yeux étaient encore humides et rougis par les larmes. Mais tant pis pour elle, elle aurait dû accepter ses grâces au moment où il voulait bien les céder. A présent, elle devrait subir les conséquences de ses actes et peut-être qu’elle apprendrait de ses erreurs. D’une certaine manière, Raphaël jugeait que cela était un bon premier entraînement pour mater les jeunes filles butées. Il sentait qu’il allait avoir du fil à retordre avec Skylar Lyra, alors autant s’exercer sur de la mauvaise graine comme Milie-Rose.

Il était prêt à lui asséner une nouvelle remarque quand des marques qu’il connaissait trop bien pour ne pas les reconnaitre, se firent voir sur le cou de la jeune femme. Tout à coup, leur rixe prit une tournure totalement singulière. Elle n’était plus une collègue capricieuse, mais bien une personne qui tentait de cacher quelque chose de grave et de dangereux. Raphaël ne fit aucun détour pour comprendre de quoi il en retourner ou pour ménager les sentiments de la jeune femme. Il n’était pas taillé pour trouver de jolis mots, être subtil ou trouver la meilleure formulation afin de ne pas la heurter. Au contraire, il lui demanda de but en blanc qui lui avait fait de telles marques. Et à partir de là, pourquoi ? Quand ?
Raphaël n’était sûrement pas bien placé pour contester les violences faites aux femmes, lui avait maltraité la sienne durant si longtemps. Mais à présent qu’il était responsable de deux fillettes, il prenait le problème sous un nouvel angle. De la même manière qu’il n’aurait pas pu supporter que cela puisse arriver à sa sœur, Becca.

Cependant, Milie-Rose se mura dans un silence buté. Elle releva le col de son uniforme mais il en faudrait plus pour effacer la mémoire de Raphaël, aussi la dévisagea-t-il jusqu’à obtenir gain de cause. Toutefois, en cherchant à capter son regard, il y décela quelque chose de plus effrayant. Une profonde détresse qu’il ne savait guère comment interpréter. La réponse que lui offrit la jeune femme ne l’éclaira guère plus. « Va falloir s’y prendre un peu mieux pour que j’oublie, ma belle. » Raphaël renifla pour afficher une sorte de rire moqueur. « Puis si tu crois que c’est juste un p’tit connard qui pourra me faire du mal, c’est que tu connais bien mal ma vie. Des truands, j’en ai vu passer des tas, alors c’est pas un connard qui frappe une femme qui pourra me faire peur. » Et après… quoi ? Raphaël n’était plus certain de savoir ce qu’il fallait dire. De toute évidence, il ne pouvait pas spécialement s’en tenir là. Il l’avait bien trop fait chier pour en apprendre plus. « C’est ton mec ? »
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